Venez les jeunes, venez les inconnus,
Goûtez mon vin pur …
Volodymyr Svidzyns’kyi
Volodymyr Svidzyns’kyi a peint l’univers incroyable, lui, poète, que Pavlo Tytchyna appelait « maître », homme merveilleux et confrère fidèle. Il est le premier à entendre lire par leurs auteurs les poèmes de Mykola Bajan, Mike Johansen, Vasyl’ Myssyk, Volodymyr Sossiura, Pavlo Tytchyna, Youriy Yanovs’kyi, qui reconnaissent son fin goût esthétique, son intelligence et son credo d’artiste indépendant.
Volodymyr Svidzyns’kyi est né le 8 octobre 1885, dans le village de Mayaniv, en Podolie (aujourd’hui le département de Tyvriv de la région de Vinnytsia) dans la famille d’un sacristain. Le futur poète fait ses études aux séminaires de Tyvrivet et à celle de Kamianets’-Podilskyi. Entre 1907 et 1912, il fait ses études à l’Institut de Commerce de Kyïv, où il fait connaissance avec le poète Pavlo Tytchyna. Très vite, il devient son ami. En 1912, Volodymyr Svidzyns’kyi publie son premier poème, Je t’attends longtemps, longtemps, dans la revue de modernistes ayant pour titre « Une petite maison ukrainienne » (« Une khata ukrainienne »).
Le poète reste deux ans à Lviv pendant la Première guerre mondiale. Lors de la révolution, il vient à Kamianets’-Podilskyi où il travaille à la maison d’édition du conseil général de la Podolie. Là, il se marie avec Zinaïda Sulkovs’ka, institutrice de l’école publique, devenue son inspiratrice et sa Muse. En 1921, ils ont leur fille Myroslava. Volodymyr Svidzyns’kyi lui écrit de merveilleux contes et beaucoup de poésies. C’est ici, à Kamianets’-Podilskyi, que paraît son premier recueil de vers Les poésies lyriques (1922).
En 1925, Volodymyr Svidzyns’kyi déménage à Kharkiv, il y travaille en tant que correcteur et rédacteur littéraire de la revue « Tchervonyi chliakh » (La voie rouge). Il occupe le même poste dans l’édition du Journal littéraire, de 1936 jusqu’au début de la guerre, en 1941. Son deuxième recueil, Septembre, est publié en 1927, à Kharkiv. La critique soviétique ne l’apprécie pas à cause de la défense des valeurs humaines et de l’hauteur d’esprit des hommes et des femmes présentes à la place de la description de la lutte des classes.
Le poète écrit des vers, crée son poème Tribunal (1937), il traduit les chef-d’œuvres de la littérature mondiale comme ceux d’Ovide, d’Hésiode, d’Aristophane, de Lope de Vega, d’Alexandre Pouchkine, d’Ivan Tourgueniev, d’Anton Tchekhov, de Maxime Gorki et d’Ivan Loutsévitch (Yanka Koupala). En outre, il fait une des meilleures traductions de l’immortel Le Dit de la campagne d'Igor (Slovo o Polkou Igoriévié) en ukrainien moderne.
La vie à Kharkiv est très dure pour les Svidzyns’kyi : le salaire étant très petit, ils vivotent à peine, sont obligés de louer un petit appartement... Au début des années 1930, la femme de Volodymyr Svidzyns’kyi ne peut plus supporter cette vie de misère, qui dure plus de dix ans. Les époux se séparent. Zinaïda Svidzyns’ka prend sa fille et déménage chez sa sœur à Vinnytsia. Volodymyr Svidzyns’kyi vit très mal la séparation, sa famille lui manque fort. Le malheur poursuit le poète : le 13 juillet 1933, sa femme meurt. Le poète prend sa fille à Kharkiv et l’élève lui-même. D’ores et déjà, c’est elle qui remplit sa vie, c’est pour elle qu’il vit, mais aussi pour la poésie. Avec ses sentiments, il écrit les cycles de poèmes Trahison, En mémoire de Zinaïda Sulkovs’ka.
Le troisième recueil de Volodymyr Svidzyns’kyi paraît à Lviv, en 1940. Son rédacteur est Youriy Yanovs’kyi. Dans ce recueil sont présents les poèmes des éditions précédentes, plus d’une cinquantaine de nouvelles œuvres, trois contes et des traductions. Le poète rédige son quatrième recueil « La collecte du miel » (Medobir). Les hommes des lettres de Kharkiv ne peuvent lire que sa version manuscrite.
Volodymyr Svidzyns’kyi meurt le 18 octobre 1941. La veille de l’occupation de la ville par les Allemand, il est arrêté par le NKVD à cause de son refus de quitter Kharkiv. Il est brûlé vivant dans une baraque, sous Koupiansk, avec d’autres prisonniers du pouvoir soviétique.
Le poète Vassyl Stouss écrit sur Volodymyr Svidzyns’kyi : « … Ses vers sont complètement asociaux, ils sont remplis d’une entité intérieure sans toutes intentions extérieures… Ses poèmes, c’est la mesure de la confiance en soi de l’auteur et de son appartenance à lui-même, c’est les notes du journal intime de cet intellectuel qui s’isole consciemment du monde entier ». Mais cela ne veut pas dire que le poète ne s’adressait qu’au genre de la réflexion de soi, qu’aux pensées philosophiques sur l’essentiel de l’existence. Dans l’héritage littéraire de Volodymyr Svidzyns’kyi, on trouve des élégies, des chansons, des ballades, des sonnets...
Le premier recueil du poète, « Les poèmes lyriques », est marqué par les tendances symbolistes. L’artiste s’appuie sur les images poétiques folkloriques ainsi que sur les images mythologiques. Dans son monde artistique, on voit fleurir les symboles et archétypes primitifs. L’œuvre de Volodymyr Svidzyns’kyi est proche du panthéisme de Pavlo Tytchyna. Ce qui est de commun entre les deux auteurs ce n’est pas l’admiration de la nature, mais plutôt la compréhension d’un être humain, inséparable d’elle, une partie harmonique de l’Univers, l’adoration et l’ivresse par la vie, par des couleurs brillants et des mélodies radieuses de printemps, d’été, d’automne ou d’hiver. La composition monologique et dialogique des poèmes de Volodymyr Svidzyns’kyi ressemble à la structure des œuvres folkloriques. C’est pourquoi les vers du poète ne sont pas seulement de la lyrique paysagiste avec les descriptions de pittoresques endroits de la nature ukrainienne. C’est aussi, selon Ivan Dziuba, « la philosophie poétique de la nature, et plus concrètement : la vie humaine dans les images de la nature, avec "l’appartenance" à la nature ».
La poésie de Volodymyr Svidzyns’kyi fait partie de la poésie ukrainienne de la première moitié du XXe s. Le poète l’a enrichie par la clarté classique du style, l’interdépendance harmonique du narrateur et de la nature, par la profondeur philosophique. Ses images et sa poétique superposées sur le fonds national, continuent la longue histoire de la poésie ukrainienne du temps de baroque et de modernisme. L’image poétique du monde de l’artiste est multiple, elle se réfère aux notions spirituelles communes à tous les êtres humains, à savoir, le Bien et le Mal, la Vie et la Mort, le Passé et l’Eternité. Le style classique de Volodymyr Svidzyns’kyi est particulièrement approfondi par l’analyse du monde intérieur humain.
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