Olha Kobylians'ka (1863-1942)

Écrivaine, traductrice, сombattante pour les droits de femmes, critique de son époque, Olha Kobylians’ka est une vraie Européenne par sa mentalité et par la qualité de son œuvre

Olha Yulianivna Kobylians’ka est née le 27 novembre 1863 dans une petite ville, Hura-Humora, en Bucovine du Sud (appartenant à l’époque à l’Empire d’Autriche), dans la famille d’un petit fonctionnaire. Elle est le quatrième enfant dans la famille de sept enfants. La future écrivaine change souvent de lieu d’habitation. Elle passe son enfance à Hura-Humora (Gura Humorului), à Suchava (Suceava), à Kympolunh (Câmpulung) et à Dymka (Dimca). A partir de 1891, elle s’installe à Czernovitz, la capitale autrichienne du Duché de Bucovine (actuellement Tchernivtsi, en Ukraine).

Olha Kobylians’ka grandit dans un milieu multilingue, dès son enfance elle parle allemand, polonais et ukrainien. Faute d’écoles ukrainiennes en Autriche, c’est en allemand qu’elle fait ses études. Les premières œuvres littéraires de l’écrivaine sont naturellement écrites en allemand (au début des années 1880). Ce sont de petites nouvelles qui relatent la vie de l’intelligentsia et du peuple ukrainiens d’une petite ville de province autrichienne (Hortense ou La Vie d’une jeune fille, La Destinée ou la liberté, Une esquisse de la vie populaire en Bucovine, Un mirage, Un homme du peuple). La langue allemande, ainsi que la culture germanique, jouent un rôle important dans la vie et dans l’œuvre d’Olha Kobylians’ka. Comme l’a bien souligné son amie, Lessia Oukraïnka, l’allemand lui a permis de faire ses débuts dans une culture « plus vaste ». Plus tard, sous l’influence de son entourage, à savoir Natalia Kobryns’ka, écrivaine et une des fondatrices de mouvement de femmes en Galicie ; Sophiya Okounevs’ka, la première femme médecin en Autriche-Hongrie (elle est le prototype de l’héroïne de La Destinée ou la liberté) ; Augusta Kokhanovs’ka, peintre qui illustre les nouvelles de l’écrivaine ; Olha Kobylians’ka commence à écrire en ukrainien.

En étant une autodidacte (elle n’a fait que quatre classes d’études), Olha Kobylians’ka lit les ouvrages sur la sociologie, la politologie et les traités philosophiques. Elle fait aussi de la musique (joue de différents instruments de musique), de la peinture et du théâtre. Elle souhaite même devenir actrice, mais la littérature prend le dessus. En même temps, Olha Kobylians’ka participe activement au mouvement féministe et aborde un grand nombre de questions qui sont douloureuses pour les femmes d’époque. En 1894, elle devient une des initiatrices de la création de « l’Association de Femmes Ukrainiennes de Bucovine ». Elle décrit les objectifs de ce mouvement dans sa brochure Quelques mots sur l’idée du mouvement féministe. L’écrivaine y soulève la question de la situation difficile des femmes de la classe moyenne, lutte pour l’égalité des droits des femmes et des hommes, pour leur droit à la vie digne.

Ces idées apparaissent déjà dans les premières œuvres de l’écrivaine (Hortense, Elle se maria, entre autres), où Olha Kobylians’ka souligne le thème de la quête du bonheur féminin. Dans le récit Un être humain, et encore plus dans La Princesse, le bonheur personnel de ses héroïnes dépend des problèmes sociaux, il est lié à la position active de femme dans la vie, à la nécessité de combattre contre les circonstances qui empêchent le développement de forces spirituelles de femmes. Dans cette nouvelle, Olha Kobylians’ka confirme sa manière réaliste d’écriture et son penchant à l’analyse psychologique. Dans ses nouvelles, Olha Kobylians’ka traite des problèmes moraux et éthiques de la vie des représentants de l’intelligentsia ukrainienne (L’Aristocrate, Une fantaisie impromptue). Elle crée trois personnages intègres des femmes-intellectuelles dans son fameux récit Valse mélancolique (1898). Plus tard, elle revient à ce sujet dans les nouvelles Niobé (1905), Par-dessus de la passerelle (1912), Suivant les situations (1913). La condition des intellectuels ukrainiens traverse tout l’œuvre d’Olha Kobylians’ka, à partir de ses premières nouvelles et récits jusqu’à son dernier roman L’apôtre de la foule (1936).

La description de la vie à la campagne, de ses problèmes sociaux et psychologiques, ainsi que moraux et éthiques, devient la deuxième ligne principale dans l’œuvre d’Olha Kobylians’ka. Les Carnets de l’écrivaine attestent, d’une manière convaincante, que dans la seconde moitié des années 1880, elle partage les idées politiques de gauche. Dans la nouvelle La Mendiante, l’écrivaine montre la femme du peuple qui s’est trouvée sans moyens d’existence et vit de l’aumône. Au milieu des années 1890, elle approfondit ses connaissances sur la vie des paysans. Olha Kobylians’ka peint des images profondément véridiques de la vie paysanne dans les nouvelles Une banque rustique, Sur les champs, Chez Saint-Jean, Une femme inculte. En s’inspirant de la vie des habitants du village Dymka, elle écrit son chef-d’œuvre La Terre (1902).

Le récit d’Olha Kobylians’ka La Terre n’est pas seulement une des œuvres clés de la littérature ukrainienne, mais aussi une contribution importante de l’écrivaine dans l’élaboration du thème de la propriété des terres dans la littérature mondiale. « La Terre se base sur un fait divers. Presque tous ses personnages sont réels. Je souffrais physiquement, en mettant ces faits sur le papier, quand j’écrivais – je sanglotais ! » – confie Olha Kobylians’ka dans son essai autobiographique Sur moi-même. Un autre grand écrivain ukrainien, Ivan Franko, a caractérisé La Terre comme une œuvre qui, outre sa valeur artistique, « aurait une valeur qui dure, comme celle d’un document, suite à sa façon de penser notre peuple et notre dure époque des troubles et des catastrophes. » Le récit La Terre d’Olha Kobylians’ka est souvent rapproché au roman d’Emile Zola, La Terre.

Au début des années 1890, l’écrivaine tâche d’étendre la sphère de ses recherches littéraires et recourt aux sujets et aux personnages abstraits et symboliques (dans Les Accords, La Croix, La Lune). Elle écrit une série de poèmes en prose, parmi lesquelles il y a de parfaites « miniatures littéraires ». Olha Kobylians’ka fait publier certaines de ses œuvres dans quelques revues modernistes : à savoir, « Svit » (Monde), « Oukraïns’ka khata » (Maison ukrainienne). Tandis que les tendances réalistes de l’œuvre d’Olha Kobylians’ka se réunissent d’une manière originale dans un de ses meilleurs récits Dimanche, de bon matin, elle déplantait des herbes. Le thème d’une chanson-ballade folklorique, Hryts’, ne va pas aux veillées, est à l’origine de cette nouvelle. Elle est traduite en plusieurs langues, souvent mise en scène dans les théâtres de l’Ukraine.

De 1918 à 1940, quand la Bucovine du Nord se trouve sous la domination de la Roumanie, Olha Kobylians’ka travaille dans des circonstances très difficiles. La langue et la culture ukrainiennes dans cette région sont sévèrement persécutées. En 1921-1923, Olha Kobylians’ka établit donc des contacts avec les différentes revues de l’Ouest de l’Ukraine : à savoir, « Promin’ » (Le Rayon), « Novi chliakhy » (Les Nouvelles Voies). En Ukraine soviétique, en 1927-1929, dans la maison d’édition de Kharkiv « Rukh » (Le Mouvement) ses Œuvres choisies en neuf volumes voient le jour.

Les nouveaux thèmes apparaissent dans les œuvres d’Olha Kobylians’ka en période de la Première Guerre Mondiale et au temps de l’occupation roumaine de la Bucovine du Nord. Le sujet de la guerre entre dans les récits de l’écrivaine (Judas, La Lettre du soldat condamné, écrite à sa femme, A la rencontre du sort (1917) ; Il est devenu fou (1923), etc.) Après la guerre, certains récits et nouvelles d’Olha Kobylians’ka contiennent l’analyse des problèmes éthiques et moraux (par exemple, dans la nouvelle de mœurs La Louve). L’œuvre d’Olha Kobylians’ka des années 1920-1930 subit une certaine influence du symbolisme (Je rêve, Sainte Vierge, gracie-nous ! ).

Olha Kobylians’ka meurt le 21 mars 1942 à Tchernivtsi. Ayant débuté au milieu des années 1890 comme une écrivaine ukrainienne avec des récits et nouvelles sur la vie de l’intelligentsia bucovinienne, presqu’un demi-siècle après, Olha Kobylians’ka est l’auteur de plusieurs récits, nouvelles, traductions, essais, articles de presse et articles critiques. De plus, elle nous a laissé une correspondance considérable. Une grande partie de ses œuvres est écrite en allemand (il n’y a que certaines d’elles qui sont publiées ; en 1901 elles paraissent dans le livre intitulé Kleinrussische Novellen). Certaines de ses œuvres ont été adaptées au cinéma et au théâtre ukrainiens : La Terre en 1954, La Louve en 1967, Valse mélancolique en 1990, La Princesse en1994.

Actuellement le théâtre de Tchernivtsi et une rue piétonne de centre ville portent le nom d’Olha Kobylians’ka. A Tchernivtsi et dans le village de Dymka sont ouverts les musées d’Olha Kobylians’ka. En 1999, le journal régional « Assemblée de Bucovine » et le musée d’Olha Kobylians’ka de la ville de Tchernivtsi fondent le Prix d’Olha Kobylians’ka.

Traductions des œuvres d’Olha Kobylians’ka dans d’autres langues :

En 1900, paraissent les traductions russes des nouvelles d’Olha Kobylians’ka Une banque rustique, La Mendiante, Chez Saint-Jean. Elles sont réalisées par Olha Kossatch (fille d’Olena Ptchilka et sœur de Lessia Oukraïnka) et sont publiées dans la revue « La Vie ».

En 1901, le recueil de ses nouvelles Kleinrussische Novellen («Les Nouvelles ukrainiennes») paraît en allemand. Il contient, entre autres, les nouvelles La Bataille, La Nature, Une femme inculte. En 1906, ce recueil est traduit en langue tchèque.

Le récit d’Olha Kobylians’ka La Terre est traduit en français.

Photos du musée d'Olha Kobylians'ka, dans son village natal, Dymka

(prises par Aurica Svitlyts'ka).

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire