Oulas Samtchouk (1905-1987)


Oulas Samtchouk est considéré comme le premier prosateur qui consacre son œuvre au Holodomor. Son roman Mariya (1934) est traduit en français en 1955.
Oulas Samtchouk (pseudonyme d’Oulas Danyltchouk) est né, en 1905, dans la région de Rivne (en Volhynie qui est à cette époque sous l’occupation polonaise), dans la famille d’un paysan fortuné. Il fait les premiers essais d’écriture encore au gymnasium, où il rédige des journaux manuscrits, « La Jeunesse » et « La Vague ». Le récit Sur les sentiers anciens est sa première œuvre publiée qui paraît dans la revue varsovienne « Notre conversation » (Nacha besida) en 1926.
En 1924, Oulas Samtchouk, le jeune homme de 19 ans, fait une tentative de traverser clandestinement la frontière soviéto-polonaise, car il considère que son aspiration à devenir écrivain ne peut se réaliser qu’à Kyïv. Cette aventure se termine par le séjour dans une prison polonaise. En 1927, en désertant de l’armée polonaise, il réussit à traverser la frontière allemande. Il s’installe à Breslau, où il s’inscrit à l’université. De Breslau, il envoie à la revue littéraire la plus connue, éditée à Lviv, « LNV » (Literatourno-naoukovyi visnyk, dès 1933 Visnyk), ses premiers récits. Puis, il déménage à Prague.
La vie culturelle ukrainienne à Prague d’entre deux guerres est très intense. Plusieurs établissements d’enseignement et associations scientifiques et culturelles ukrainiens y fonctionnent à l’époque, à savoir : L’Université Libre Ukrainienne (où Oulas Samtchouk fait ses études en 1929-1931), l’Institut Supérieur Ukrainien Mykhaïlo Drahomanov, l’Atelier Ukrainien des Arts Plastiques, l’Association historique et philologique ukrainienne, l’Académie Ukrainienne d’Administration. Parmi les personnalités qui ont contribué à créer cette ambiance culturelle se trouvent Oleksandr Oles’, Oleh Olgytch, Stépan Smal-Stots’kyi et beaucoup d’autres. C’est à Prague qu’Oulas Samtchouk se forme comme un auteur à gloire littéraire. C’est là qu’il écrit ses œuvres les plus connues : Mariya (1933), Volhynie (1932-1937), Koulak (1932, publié à Tchernivtsi en 1937) et Les Montagnes parlent (1932-33).
Vers la fin des années 1930, Oulas Samtchouk devient un homme politique engagé, il lutte pour l’indépendance nationale et culturelle de l’Ukraine. En 1938-1941, il participe aux activités de la Référenture Culturelle de l’union des nationalistes ukrainiens dont les activités ont joué un rôle décisif dans la proclamation de l’indépendance de l’Ukraine Transcarpathique. Pendant qu’il occupe des postes politiques, son écriture littéraire s’arrête.
En été 1941, comme membre d’un groupe de OUN de Melnyk, il se retrouve en Ukraine : d’abord, brièvement, à Lviv, puis, pour plus longtemps, à Rivne. Il est rédacteur en chef du journal « Volhynie » qui commence à paraître à Rivne, en 1941, lors de l’occupation allemande. Il travaille dans le Bureau allemand de presse ce qui lui permet de faire le tour du pays. Néanmoins, en 1942, il est arrêté par les pouvoirs allemands qui l’accusent de prendre trop de distance avec les consignes données et de faire paraître des publications indépendantistes.
En fait, au début de 1942, Eric Koch introduit la censure rigoureuse dans la presse ukrainienne. Cette mesure a convaincu, une fois de plus, les patriotes ukrainiens que le régime allemand ne permettrait jamais à leur peuple de réaliser leurs aspirations politiques et nationales. De plus, les Allemands annihilent l’intelligentsia et donc la culture ukrainienne. En février 1942, à Babiy Yar sont fusillés le rédacteur en chef du journal « La Parole ukrainienne », Ivan Rohatch, et l’amie d’Oulas Samtchouk, l’écrivaine, Olena Tèliha. En réagissant à cette sauvagerie Oulas Samtchouk rédige l’article Il a été, il sera ! qui paraît à la une de son journal, le 20 mars 1942, en 40 000 exemplaires. C’est cet article qui provoque l’arrestation de son auteur. Quand il est relâché, il continue son travail de journaliste. De 1941 à 1943, il est auteur de plus d’une centaine d’essais, comptes rendus, critiques, reportages, etc.
Oulas Samtchouk travaille avec les Allemands, tout en étant persuadé de leur défaite. Cette décision de lutter pour l’Ukraine coûte que coûte enlève à l’écrivain une bonne partie de sa vie et de sa bonne réputation. Il faut dire, qu’il a toujours bien su profiter de l’occupation : il voyage beaucoup, note ses impressions qui lui servent pour ses futurs livres. Les témoignages sur les événements vécus constituent le livre Ce que le feu ne soigne pas (sur les combattants de l’UPA) ; la trilogie OST dont le premier volume, Le Hameau Moroziv (1948), relate les événements de 1918-1919, le deuxième volume, Les Ténèbres (1957), raconte le sort de l’Ukraine en URSS, et le dernier roman, La Fuite de soi-même (1982), est consacré à la vie des millions d’immigrés ukrainiens vivant dans les différents coins du monde ; la trilogie Volhynie (romans Volhynie, La Guerre et la révolution, Un Père et un fils).
Faisant partie de cette émigration ukrainienne damnée et accusée de tous les maux, il se retrouve, jusqu’en 1948, dans les camps DP. Les écrivains ukrainiens sont ressemblés dans ce camp sous l’égide du Mouvement Artistique Ukrainien (MAU) qui est crée en 1945. Oulas Samtchouk devient son chef. Parmi ses membres il y a Ivan Bagrianyi, Vassyl Barka, Yuriy Klen, Yuriy Lavrinenko, Yevhène Malaniuk, Todos’ Os’matchka, une soixantaine de noms en tout.
En juillet 1948, Oulas Samtchouk émigre au Canada. Là-bas, il termine sa trilogie OST, écrit le livre Ce que le feu ne soigne pas. Mais ce sont les écrits qui n’ont pas trouvé d’intérêt parmi les lecteurs… Il a terminé sa vie oublié par tous, dans la misère, sans enfants, sans gloire. Il est mort le 9 juillet 1987 au Canada.

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